Âgisme et autres discriminations

Homogénéité des individus catégorisés « personne âgée », « senior », « aîné »…

Selon la définition de l’organisation mondiale de la santé (l’OMS), une personne est considérée comme âgée à partir de 65 ans. Quant à la Haute Autorité de Santé (la HAS), elle désigne « personne âgée » une personne de plus de 75 ans, ou de plus de 65 ans ayant une pathologie. Nous sommes aujourd’hui en France plus de 13 millions de personnes qui ont 65 ans et plus, ces personnes ne forment pas une catégorie sociale homogène nommée comme « personne âgée », « senior », ou « aîné ».

La capacité physique et cognitive, l’apparition des pathologies liées à la vieillesse, varient entre les personnes : on peut bien constater d’un côté une personne de 65 ans en perte d’autonomie, et une personne de 75 ans capable de participer au marathon de l’autre.

L’espérance de vie continue à augmenter depuis 1970, mais l’écart d’espérance de vie entre les femmes et les hommes et entre les catégories socioprofessionnelles se maintiennent : l’écart entre l’espérance de vie des cadres et celle des ouvriers est de 6,4 ans pour les hommes et 3,2 ans pour les femmes (1).

Les multiples facteurs comme le sexe, le revenu, la situation matrimoniale, le parcours professionnel, etc. déterminent l’évolution du vieillissement, mais aussi les conditions de vie et le désir. Entre les personnes âgées de plus de 65 ans, certaines n’auront aucunes caractéristiques communes en dehors de l’âge biologique.

Âgisme et sexisme : dévalorisation des femmes « âgées »

L’image dévalorisée sur le vieillissement impacte plus les femmes que les hommes. Cela s’explique par les qualités que notre société attribue aux genres masculin et féminin. L’aspect esthétique représente plus souvent la qualité féminine que celle masculine. Les critères de beauté féminine sont basés sur la valeur de jeunesse. Quant à la qualité attribuée au genre masculin, ce sont d’abord les dimensions intérieures (compétent, rationnel, sérieux, etc.) plutôt que les aspects esthétiques. Alors que l’aspect esthétique est considéré comme diminuant avec l’âge, la qualité intérieure est supposée augmenter.

En dehors de la représentation des vieilles, les femmes âgées ont plus de risque de vivre dans des conditions de vie précaires que les hommes et plus de risque de subir les discriminations. Les femmes vivent plus longtemps que les hommes (60% des individus plus de 75 ans sont des femmes) (2), plus elles sont âgées plus elles vivent souvent seules ( 55 % des femmes ayant plus de 85 ans qui vivent seules, alors que seulement 25 % des hommes ayant plus de 85 ans vivent seuls) (3), Le revenu moyen des femmes est moins élevé (le revenu des femmes en moyenne est 25% inférieure à ceux des hommes en 2018) et la durée de cotisation est moins longue que celle des hommes (4).

L’enquête nationale sur les violences faites aux femmes, menée par l’INSEE (5) ou l’Ined (6) a une limite probablement méthodologique pour saisir les violences subies par les femmes âgées de plus de 70 ans, mais cela ne veut pas dire que les femmes âgées ne sont pas victimes de violences conjugales et d’agressions sexuelles. Plusieurs études montrent que les situations des femmes victimes de violences conjugales sont plus problématiques que celles des jeunes (7). Le fait de subir la violence conjugale pendant de nombreuses années impact gravement la santé psychique et psychologique des femmes. L’éloignement de l’auteur de la violence est plus compliqué que chez la population plus jeune en raison de la non disponibilité de logements adaptés. La perte d’autonomie due au vieillissement ou à la maladie peut favoriser le risque d’agression sexuelle. L’impacte physique et psychologique est si grave que les victimes ont peu de chance de survivre après l’agression (dans le cas de blessures importantes ou de conséquences psychologique) (8).

Nous recevons régulièrement via l’accueil téléphonique d’ALlô MAltraitance des personnes âgées et majeures handicapés (ALMA) des témoignages de victimes femmes âgées ou de leur entourage concernant la violence conjugale et intrafamilial.

1 -Nathalie Blanpain (2016), « Les hommes cadres vivent toujours 6 ans de plus que les hommes ouvriers », Insee Première n°1584

2- Insee, Estimations de population en 2023

3- Insee, France, portrait social Édition 2019, senior

4- Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquête Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) 2018.

5-Les populations de l’enquête « Cadre de vie et sécurité » en 2007 que l’INSEE a rapporté les violences faites aux femmes sont celles entre 18 et 59 ans.

6- Les populations des deux enquêtes menées par l’Ined – l’enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (Enveff) en 2000 et Violences et rapports de genre : contextes et conséquences des violences subies par les femmes et les hommes (VIRAGE) en 2015 – sont celles entre 20 et 69 ans.

7- Bonomi, AE., Anderson, ML., Reid, RJ., Carrel,D., Fishman, PA Rivara., FP., et Thompson .,RS(2007), “Intimate Partner Violence in Older Women”, The Gerontologist, 47, 1, Lyse Montminy, Christine Drouin (2009), « La violence en contexte conjugal chez les personnes âgées : une réalité particulière », Collection Études et analyses, n° 42

8- « Violences sexuelles : en Ehpad, les femmes vulnérables sont des proies », Mediapart, 19 décembre 2022